LA DIVERSIFICATION ALIMENTAIRE CHEZ LE TOUT PETIT

  • Auteur/autrice de la publication :
  • Post category:Alimentation
  • Dernière modification de la publication :28 mai 2020
  • Temps de lecture :10 min de lecture

Introduire des aliments solides, après plusieurs mois passés à ne donner que du lait à son bébé, est une étape importante pour les parents ; étape au cours de laquelle il sont à cœur de faire ce qu’il y a de mieux pour leur enfant.

Pourtant, entre les recommandations du pédiatre, les conseils des mamies,ceux de la voisine et des tatas, sans oublier les mérites du dernier petit pot vantés à la télévision, ni les dernières données scientifiques concernant les allergies anciennes et nouvelles, il y a de quoi être perdu !

Quel parent ne souhaiterait pas que son enfant mange de tout, avec plaisir et bon appétit ? Quel parent ne rêverait pas que le moment du repas soit un moment agréable de partage sans tension aucune, ni lutte pour lui faire ouvrir la bouche et avaler ce qu’il y’ a dans son assiette ?

Il est évident que la manière dont l’enfant va entrer en contact avec la nourriture, plus précisément les aliments solides, aura une certaine influence sur sa façon de se nourrir et son rapport à l’alimentation tout au long de sa vie.
Dès lors, il est important de réfléchir sur ce que l’on transmet à l’enfant par l’alimentation,au-delà du simple fait de remplir son estomac.

Qu’est-ce-que «manger » ?

Manger c’est apporter, ​avec plaisir​, des éléments nécessaires au développement de l’organisme.

Brillat Savarin nous en donne la plus belle et complète des définitions : “ manger est le premier plaisir que l’Homme a en naissant et le dernier qui reste lorsque tous les autres ont disparu. Manger est alors plus que se nourrir, c’est une expression de notre Humanitude et des liens qui nous unissent”.

Qu’est-ce-que la diversification alimentaire ?

La diversification alimentaire est le passage d’une alimentation uniquement lactée liquide à une alimentation semi-liquide, puis à une alimentation solide.
L’apport lacté restant prioritaire et majoritaire car le lait (source de calcium) reste indispensable à la croissance harmonieuse jusqu’à l’âge adulte.

Quand débuter la diversification alimentaire ?

Selon l’OMS, l’allaitement maternel couvre la totalité des besoins de l’enfant jusqu’à ses 6 mois. Partant de ce fait, la diversification alimentaire est une décision personnelle inhérente aux parents et sur avis et conseils médicaux du pédiatre de votre enfant.

En général, la diversification alimentaire débute au 4è mois révolu de l’enfant. Elle se fait de façon progressive : 1 aliment à la fois, maintenu pendant quelques jours.

Comment introduire de nouveaux aliments ?

Le principe est de faire découvrir de nouvelles saveurs à l’enfant d’une manière saine qui lui soit agréable (trop d’enfants développent des blocages alimentaires qui mènent à des situations de conflit, de forçage), amusante et sans danger.

Selon la pédiatre hongroise Emmi PIKLER : « dès son plus jeune âge, l’enfant a en lui les compétences nécessaires pour prendre une part active à son développement ; et pour peu qu’on le laisse se mouvoir en liberté et explorer le monde qui l’entoure dans un environnement affectif stable, il se développe spontanément, à son rythme, dans le plus grand plaisir et avec un schéma corporel d’une grande finesse ».
On retrouve cette même qualité d’approche dans sa façon d’aborder l’alimentation. L’observation de l’enfant, fondamentale, va permettre de savoir où celui-ci en est de son développement et à quel rythme il évolue, pour ainsi pouvoir s’adapter.

Ainsi, c’est en suivant son développement psycho-moteur que l’on saura quand il est prêt à découvrir les aliments solides.
Observer permettra de s’adapter à l’appétit de l’enfant car « bébé sait quand il faim, mais également quand il est repu ». Il est donc nécessaire de l’écouter et ne pas lui donner une cuillère de plus quand il montre qu’il n’en veut plus (même si c’est la dernière cuillère de l’assiette).

Les quantités standards recommandées selon l’âge ne sont que des repères donnés à titre indicatif, et ne peuvent donc pas toujours être représentatifs de l’appétit de tous les enfants.
L’enfant est une personne à part entière ; de ce fait, comme chez les adultes, certains ont un appétit d’oiseau quand d’autres ont un appétit d’ogre.

En prenant le temps d’observer l’enfant, on sera très tôt à même de déterminer quelle quantité lui proposer.

L’enfant a également besoin de repères dans son environnement, dans l’organisation de sa journée, et donc aussi pour ses repas.
Avoir une routine autour du moment du repas, ainsi que la mise en place progressive d’une certaine régularité dans les horaires permet au bébé d’anticiper le moment du repas et donc de s’y préparer.

L’approche de Mme PIKLER fait aussi référence à la notion d’autonomie. En effet, en permettant à l’enfant de saisir lui-même les aliments et les découvrir plutôt que de les lui donner à la cuillère, on le rend acteur de ce moment riche de sens qu’est le repas. Nous lui permettons ainsi de vivre le plaisir de la découverte par lui-même, et cela participe à la construction de sa confiance en soi.
Il est important que ses initiatives au cours du repas soient prises en compte ; Le laisser manipuler le biberon, la cuillère, le verre, l’aider au minimum lui permet de participer activement.

Il existe une autre approche de la diversification alimentaire, appelée DME pour Diversification Menée par l’Enfant.
C’est en observant ses propres enfants et ceux de son entourage que Gill RAPLEY, infirmière anglaise pendant 20 ans reconvertie en sage-femme et consultante en lactation a mis en lumière cette approche de la diversification alimentaire, qui est complémentaire à la première puisqu’elle concerne les bébés âgés de 6 mois et plus.

Les études scientifiques sur le sujet sont peu nombreuses, mais l’expérience et de nombreuses explications physiologiques vont dans ce sens. Il est question ici de découvrir une autre façon de faire que celle utilisée traditionnellement pour la diversification, et de voir en quoi elle peut être intéressante.

Les bases physiologiques qui sous-tendent cette nouvelle méthode sont les suivantes :

  • On peut considérer qu’un enfant est prêt à commencer à intégrer des aliments solides à son alimentation quand on le voit intéressé par notre nourriture (suit du regard, essaye d’attraper ce que l’on mange,..)
  • Il « maîtrise » la position assise (il sait se mettre et sortir de cette position en totale autonomie) il maîtrise le geste d’attraper l’objet convoité et le porter à la bouche
  • Il commence à mastiquer

En général tout ceci se produit vers l’âge de 6 mois, mais peut aussi se produire plus tôt ou plus tard. A cet âge là, les systèmes digestif et immunitaire de l’enfant sont arrivés à une maturité suffisante et il a déjà bien travaillé sa motricité buccale après plusieurs mois passés à têter.

En terme de sécurité, il est évident que le rôle de l’adulte est de veiller à proposer à l’enfant des aliments adaptés, c’est-à-dire :

  • Des aliments sains (légumes, fruits, féculents et protéines cuits sans adjonction de sel ou de sucre)
  • Des aliments avec une consistance facile à mâcher en forme de bâtonnet pour une préhension plus aisée.

Éviter les aliments crus, durs, ronds, petits (carottes coupées en rondelles, cacahuètes, noisettes,..) car ils sont à risque d’étouffement.
Il convient également de ne jamais laisser l’enfant seul à table face aux aliments, quels qu’ils soient !

Il ne faut pas oublier que bébé apprend en imitant ; il est donc important qu’il soit installé à table avec le reste de la famille autant que possible, surtout les premiers jours.

Au début, il va recracher ce qu’il vient de mettre en bouche. Vers 6 mois, le réflexe nauséeux se déclenche quand on porte un aliment à peu près au niveau de la moitié de la langue. Puis les jours passant, cette limite se déplacera vers l’arrière de la langue. C’est ce réflexe qui constitue une barrière efficace contre l’étouffement.

L’enfant, progressivement, en portant les aliments au niveau de sa langue et de ses mâchoires, va travailler et perfectionner son travail de mastication qui est indispensable à une bonne digestion. Il lui arrivera souvent de recracher puis de remettre en bouche et remastiquer certains aliments : apprendre à avaler requiert aussi de l’entraînement.

De plus, il ne saura faire passer les aliments de l’avant à l’arrière de la langue (donc avaler) qu’après avoir appris à mastiquer. C’est pour cela qu’un enfant à qui on donne des morceaux et qui les porte tout seul à la bouche, soit les y insère trop profondément ==> le réflexe nauséeux les lui fait recracher, soit les porte à l’avant de la langue et tant qu’il ne sait pas mastiquer, il ne saura pas les avaler.

L’autre intérêt physiologique à cette façon d’introduire les solides est le fait que la mastication est indispensable à une bonne croissance des os de la face et le contact avec des aliments solides de tailles et de consistance différentes stimule la croissance des gencives et prévient certains problèmes orthodontiques ultérieurs.

Les phases de diversification alimentaire et d’introduction d’aliment solides dans l’alimentation du nourrisson, comme toutes les autres étapes de son développement psycho-moteur, seront d’autant plus harmonieuses et agréables pour lui si on lui fait confiance et qu’on l’accompagne dans ses diverses découvertes.